Interview > 3 - 6 ans | 6 - 12 ans |
donner une sanction : pourquoi ? comment ?
Article du 17 février 2015
MagaZEN : Pourquoi parlez-vous de « sanction » plutôt que de « punition » ?
Joël Vandemoëre : Nous infligeons trop souvent une punition à notre enfant sous le coup de la colère ou de la peur : « mon fils a failli passer par la fenêtre, ma fille a confondu les murs de sa chambre avec son carnet de croquis » ! La punition alors décidée est davantage fonction de notre émotion, du stress infligé ou de la peur ressentie. La punition n’est dans ces cas plus proportionnée au comportement fautif de notre enfant, ne remplit aucun rôle éducatif, et peut éveiller chez lui un sentiment d’injustice très vif.
La sanction, c’est tout autre chose. La sanction est la conséquence définie à l’avance du non-respect d’une règle. La sanction est ce qui va permettre à votre enfant de se confronter à la réalité en lui faisant découvrir le lien entre son acte et ses conséquences sur autrui.
De nombreux psychologues réprouvent les punitions et invitent les parents à réprimer les transgressions par des sanctions.
MagaZEN : Une sanction peut-elle se révéler éducative ?
J.V. : Oui ! Il faut sanctionner un enfant lorsque celui-ci présente un comportement que nous, en tant qu’adulte, parent ou éducateur, estimons inapproprié.
Il est nécessaire de rappeler qu'un rapport d’éducation n’est pas un rapport de séduction. Le psychologue Patrick Traube précise que « l’éducation repose sur un système de règles qui doivent permettre à l’enfant de comprendre la différence entre ce qui est autorisé et ce qui est interdit et, par extension, entre le bien et le mal. Or, une règle n’en est une que si elle est assortie d’une sanction en cas de transgression. ». A partir de 2 ans, votre enfant découvre que des règles et des limites existent. C’est en l’aidant à les respecter et en faisant preuve d’une juste autorité que vous allez lui permettre de « bien grandir ».
Pour que la sanction ait un caractère éducatif, fixez d’abord les règles. Ce qui apparaît comme interdit de manière évidente pour nous adultes ne l’est en effet pas toujours pour l’enfant. Pour qu’une « bêtise » soit sanctionnée, il faut donc que l’interdit ait été au préalable clairement énoncé par l’adulte.
Avant de sanctionner, rappelez fermement la limite que l'enfant est en train de franchir, la règle qu’il va transgresser.
Une fois que vous avez fixé les règles et rappelé fermement la limite, appliquez une sanction. Vous serez alors des parents cohérents et « solides ». Votre comportement sera alors source de sécurité pour votre enfant et facilitera son épanouissement. Multiplier les menaces de sanctions sans les appliquer est le meilleur moyen de ne plus pouvoir se faire obéir.
Appliquez une sanction proportionnée à l’importance de la règle transgressée, du manquement aux valeurs posées. Ne réprimez pas de la même façon un retard, une insulte ou un mensonge. Les châtiments corporels sont toujours à bannir ! La fessée n'apporte aucune contribution éducative et se réduit souvent à un acte de violence envers l'enfant.
Privilégiez une sanction qui concoure à la réparation de la bêtise commise. Par exemple, si votre enfant a inondé le sol pendant qu’il prenait le bain alors qu’il sait très bien que c’est interdit, demandez-lui de vous aider à éponger le sol. Cela fait autant de temps en moins pour jouer ou regarder un dessin animé, ce qui constitue la sanction.
Adoptez un comportement sans ambiguïté. L’intonation, le regard et la gestuelle doivent aller dans le même sens. Dire « je t’interdis » avec la même voix que « je te propose », ou sourire en affirmant « ce que tu as fait est dangereux », c’est faire perdre toute crédibilité à l’injonction. Ne sachant plus s’il a affaire à un souhait, à une demande ou à un impératif, l’enfant désobéira sans le savoir et se sentira injustement puni.
Pour finir, comme le suggère le psychologue Jean-Louis Le Run, ne sanctionnez qu’en ultime recours, quand le rappel de la règle et les explications n’ont pas suffi. Autrement, le risque est d’entrer dans un rapport de conflit permanent où le parent/adulte sera contraint d’aller sans cesse dans la surenchère punitive. Selon lui : « si la punition devient le seul moyen de se faire obéir, c’est que l’autorité n’est pas établie ».
Toutefois, il ne faut pas non plus stigmatiser l'acte de sanctionner. La sanction doit avant tout être une réponse adaptée et ponctuelle à l'enfant.
La communication reste un préalable car elle apaise la relation, et a fait la preuve qu'elle est toujours plus efficace que la sanction.